Nous, tu nous parles pas de rap féminin

Les rappeuses francophones passent à la trappe

Silence dans les salles et dans les streams, le rap fait par des femmes ne fait pas un bruit. Il est à l'arrêt et regarde passer devant lui le train du succès avec les hommes à son bord. Pas de bol, la musique préférée des français est pleine de testostérone...

C'est une entrée en poésie qui annonce le sujet de ce lundi.

En France, et plus largement, à l'international, les rappeuses sont nettement moins représentées que leurs homonymes masculins. En effet, entre 1990 et 2004, moins de 5% des albums étaient l'oeuvre d'une femme. Un chiffre qui n'a connu qu'une légère hausse depuis. Les femmes sont donc absentes, elles ne font pas partie du tableau. Pourtant la réalité peint des auditrices relativement actives et passionnées.

À qui la faute ? Une industrie sexiste et misogyne? Des femmes moins compétentes ? Un public méfiant ?

Zoom sur les raisons qui expliquent leur position.

Dans l'inconscient, le rap est une musique liée à l'homme, la masculinité et le virilisme. On raconte d'abord les luttes politiques, puis on décrit la vie de voyou et les activités illégales et criminelles que sont la drogue, les agressions et les meurtres. Le rap se veut alors cru, dur et violent, quand ce qu'on attend des femmes est docilité, douceur et fragilité. En bref, ça ne colle pas. Bien que le genre est depuis dépassé les clichés qui lui collent à la peau et s'apparente désormais au cri et au reflet d'âmes qui souffrent (ou pas), les femmes ne sont toujours pas les bienvenues.

Comme si les hommes étaient profondément attachés à cet entre-soi et à cette culture du "boys club". Une culture bien misogyne bien sexiste donc.

Mais n'est-ce pas juste la direction artistique de notre société finalement ? #bonnequestion

Merci Casey pour cet éclaircissement. Sans grande surprise, le rap est ainsi à l'image de la société qui le nourrit. Les femmes savent kicker donc et elles kickent bien, mais elles rencontrent le grand méchant patriarcat sur le chemin de la réussite. Ces 20 dernières années, l’Hexagone a pourtant porté des rappeuses de talent qui ont révélé des plumes et des styles d’exception. Des figures comme Keny Arkana, Diam’s, Lady Laistee et Casey ont posé les bases et ouvert la voie.

Malgré l'ensemble des propositions artistiques, elles sont confrontées à la critique d'un public non réceptif. Très peu d'entre elles parviennent à connaître un succès commercial. Les français refusent de monter à bord et ont un train de retard par rapport aux américains. Le pays de naissance du genre a moins de mal à accueillir des visages féminins et à célébrer les rappeuses de légende que sont Lil Kim, Missy Elliott, Lauryn Hill, Foxy Brown ou encore Nicki Minaj. Dans un environnement où le consommateur est roi, un public méfiant a de lourdes conséquences sur l'ensemble de l'écosystème. En effet, les maisons de disque sont frileuses à l'idée de les signer et les médias sont comme désintéressés. L'absence de structure et de visibilité les freinent donc dans le développement de leur carrière.

Dans un tel contexte, les initiatives se multiplient pour mettre en avant leur art. Des médias comme Madame Rap voient le jour et participent à l'effort en présentant un panorama complet du rap fait par des femmes et LGBT+. Récemment, c'est le label GO GO GO qui vient poursuivre les travaux pour mettre les femmes sur la carte du rap français. Soutenu et accompagné par Sony Music, Netta Communication et Petit Bain , c'est un label tremplin pour les rappeuses d'aujourd'hui et de demain.

GO GO GO, c’est un projet de sororité partagé par des gens qui aiment profondément la musique et qui ont des choses à dire
— Ngielix
C’est comme un ensemble de forces positives qui nous poussent à réaliser nos rêves
— Yelsha

C'est optimiste et le regard vers l'avenir que l'on clôture ce sujet. On espère que 2023 sera une année riche en surprises et en succès pour le rap fait par des femmes. La consommation de musique ne doit pas être motivée par le genre de son interprète, mais, par la qualité de son interprétation. Faisons simplement rayonner la bonne musique, celle qui nous anime et nous passionne. #micdrop

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